Cold and alone again

Les couloirs sombres, l'humidité du sol. Cela faisait partit de ma vie, désormais. De mon paysage, de mon quotidien. Il allait falloir que je m'y habitue. Parce que si je continuais à penser que mon « chez moi » était ma petite maison de Tucson où ma mère s'était sûrement faite attrapée par les Traqueurs, ou celle de ma grand-mère où mon frère et ma soeur étaient partis juste avant qu'on apprenne l'invasion et dont on avait pas eu de nouvelles depuis, je n'allais pas aller bien loin. Il fallait bien que je me mette dans le crâne que c'était ici chez moi, maintenant, que je vivais ici, que j'y étais en sécurité. C'est juste que je pensais sans arrêt à eux, que je m'étais jurée de les retrouver. Mais une fois arrivée ici, je me rend compte à quel point c'est impossible ... Impossible de communiquer avec le monde extérieur. Ou trop dangereux. Pour l'instant, je ne pouvais pas participer aux raids. J'étais nouvelle. Je ne pouvais pas sortir ... Et ils me manquaient terriblement. Leur absence se faisait sentir chaque jour et chaque nuit, cruelle.



Pendant que je marchais, le bruit de mes pas se répercutait par écho dans les couloirs, et les galeries qui partaient à droite et à gauche. J'espérais que je n'allais réveiller ou tout du moins gêner personne, vu que l'heure était déjà avancée. La nuit était tombée et la plupart d'entre nous était allé se coucher. La plupart. Je n'arrivais pas à trouver le sommeil. Il fallait croire que, cette nuit, leur absence se faisait encore plus forte que d'habitude ...
Je clignais rapidement et nerveusement des paupières pour chasser les larmes qui commençaient à monter. Non ! Il ne fallait pas que je pleure. Plus jamais. Mission impossible, bien sûr. Je marchais de plus en plus rapidement pour évacuer mon stress et ma tristesse, même si je savais que le meilleur moyen était de faire le contraire. Soudain je m'arrêtai. Je savais que je pouvais plus retenir mes larmes, mais j'essayai quand même. Mission impossible de nouveau. Sans pouvoir lutter, je préférai m'arrêter et me laisser glisser contre le mur et essayer de me calmer. Ma vue se brouillais et c'était trop dangereux de continuer à marcher dans le noir, même si je connaissais déjà les grottes par coeur. Le moindre rocher, la moindre bosse, le moindre creux. Et la roche dans le dos qui irrite, qui frotte, qui fait mal. Qui salit et écorche les vêtements. La poussière ocre qui allait se coller à mon pull dès que je sortirais à la lumière. Je savais tout ça. Mais je restais tout de même là, blottie dans le noir, les jambes repliées, pressant mes genoux contre ma poitrine.



Un bruit de pas. D'abord au loin, hésitant, changeant de direction, venant vers moi, puis vers l'opposé. Je coupais ma respiration pour arrêter de sangloter et me redressais. J'essuyais d'un revers de manche, mes larmes qui glissaient sur mes joues. Maintenant, j'avais la manche mouillée et un goût de sel sur les lèvres ...
Les pas se rapprochèrent finalement de moi, prenant la direction du tunnel où j'étais assise. Je savais que cela ne pouvait être quelqu'un d'autre qu'un humain, que j'étais en sécurité. Pourtant, dans ces moments-là, on imagine toujours les pires choses, pas vrai ? Un Traqueurs, une Âme qui était venue m'éliminer ... N'importe quoi, naturellement.
Mais plus les pas se rapprochaient, plus ils se faisaient doux, calmes. Comme si la personne savait que j'étais là. Enfin, pas étonnant, vu que je sanglotais il y a encore quelques secondes. Mes yeux, qui avaient finis par s'habituer à l'obscurité ambiante, distinguèrent bientôt une silhouette qui commençait à se faire familière pour moi.



Lucas. Que faisait-il ici ? A cette heure ? Pourquoi il s'arrêtait et ne continuait pas son chemin normalement ?
Mais il se laissa glisser contre le mur à côté de moi, sans rien dire. Reconnaissante, je lui adressai un petit sourire.